Pacte Dutreil et usufruit

Attention à la rédaction des statuts



Le Pacte Dutreil est un dispositif fiscal qui vise à promouvoir la transmission des sociétés. Sous réserve du respect des conditions, la donation est exonérée de droits de mutation à titre gratuit à hauteur de 75 % de la valeur des titres transmis.

Les conditions pour en bénéficier sont les suivantes :
- Exercice d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale par la société ;
- Conclusion d’un engagement collectif ou unilatéral de conservation des titres de deux ans par le donateur ;
- L’engagement de conservation collectif doit porter sur au moins 17 % des droits financiers et 34 % des droits de votes ;
- Exercice d’une fonction de direction au sein de la société pendant la durée de l’engagement et les trois années qui suivent la date de la transmission ;
- Engagement individuel des bénéficiaires de conservation des titres de quatre ans.

Dans le cadre des donations de titres avec réserve d’usufruit, cette exonération est applicable à la condition que les statuts prévoient que le droit de vote de l’usufruitier soit limité aux seules décisions concernant l’affectation des bénéfices.

Cette limite aux droits de vote de l’usufruitier doit être prévue par les statuts avant la donation.

La jurisprudence a imposé cette condition depuis de nombreuses années. C’est ce que nous rappelle la Cour d’appel de REIMS dans son arrêt du 28 février 2023.

En effet, un professionnel du droit a réalisé un acte de donation et a appliqué l’exonération de 75 % du Pacte Dutreil. Or, il s’est avéré que les statuts de la société en cause n’avaient pas été modifiés avant la donation.

Par conséquent, la condition liée à la limite du droit de vote de l’usufruitier aux seules décisions d’affectation des bénéfices n’était pas remplie.

L’administration fiscale a donc procédé à un redressement en refusant l’application de l’exonération de 75 % des droits de mutation à titre gratuit.

Le professionnel du droit, ayant réalisé la donation, a été condamné par la Cour d’appel de REIMS, pour faute professionnelle, à indemniser les bénéficiaires de la donation de 90 % du préjudice subi par le redressement fiscal.

Les conditions pour l’application de l’exonération de 75 %, dite Pacte Dutreil, sont complexes et il est impératif de veiller scrupuleusement à leur respect.

Karine HEUDRON
Avocate associée

Alexandre ARBONNIER
Avocat Collaborateur